Pour cette rentrée, je vous invite à la découverte de Guillaume François, photographe animalier et initié à la découverte de la vie sauvage depuis son enfance. Si vous voulez suivre son travail, vous pouvez le retrouver:
Bonjour Guillaume,
Peux-tu te présenter en quelques lignes, comme photographe, mais pourquoi pas sur ta vie en dehors de la photographie?
Je m’appelle Guillaume FRANÇOIS, je suis né en 1993 dans le massif du Jura, à Lons-le-Saunier. Je suis photographe professionnel et je suis spécialisé dans la prise de vue de la nature sauvage. La photographie est venue se greffer sur une passion naturaliste extrêmement présente, qui s’est développée en grandissant en face de la forêt, j’ai eu cette chance d’être au contact de la nature très jeune. Mes parents m’ont initié à la découverte de la vie sauvage et de la nature dans sa globalité et très vite je me suis rendu seul sur le terrain, dans la forêt, tout d’abord avec une paire de jumelles.
Je me souviens que j’allais écouter les chants des oiseaux, et j’essayais de les reconnaître. Les empreintes des animaux me fascinaient, car je n’arrivais pas au début à faire des observations directes, donc grâce aux pistes et aux empreintes je pouvais m’imaginer alors les scènes de vie des animaux de la forêt. A l’âge de 17 ans j’ai quitté mes études pour tenter de vivre de ma passion. La nature a été ma plus belle école sans aucun doute. Elle apprend le respect de soi, d’autrui, de ce qui nous entoure de manière générale.

Portrait de Guillaume François
Peux-tu nous raconter comment la photographie est entrée dans ta vie ?
La photographie est véritablement entrée dans ma vie à mes 13 ans ; lors d’une fin de journée, j’entendais du bruit dans la forêt en face de chez moi. Je me demandais de quel animal il pouvait s’agir, j’entendais ses pas dans les feuilles sèches. En rentrant dans la lisière de forêt, j’ai alors vu un renard, juste éclairé par un ultime faisceau de lumière.
Le contraste était saisissant car il y avait en arrière-plan une sapinière très noire. Cette image est encore ancrée derrière mes yeux, c’est cela qui m’a donné envie de faire de la photographie, afin de saisir ces instants de lumières et de vie, afin de partager la beauté et la fragilité de la nature sauvage. Mes parents m’ont alors offert mon premier appareil photo après cela.

Tous droits réservés à Guillaume François
Quelles sont tes spécialités photographiques ?
Je photographie la nature dans sa globalité, cependant, je me suis spécialisé sur la prise de vue de certaines espèces ces dernières années, notamment le Lynx Boréal et le Hibou Grand-duc, dont j’ai consacré un livre pour ce dernier, intitulé « Sentinelle ».

Tous droits réservés à Guillaume François
Imagines que tu dois partir 8 jours sur une île déserte, quel matériel photographique qui t’est vital amènerais-tu ?
Tout d’abord et principalement il s’agirait de prendre et de ne pas oublier ma paire de jumelles. Concernant le matériel photo, sans doute un téléobjectif 200-400mm pour pouvoir m’adapter à de multiples situations, ensuite et si je le peux, en plus d’un boitier numérique, un appareil argentique, avec quelques diapos Provia et Velvia, j’ai un amour pour l’image authentique, fidèle et véritable.

Tous droits réservés à Guillaume François
Est-ce que ton travail est influencé par certains photographes?
Influencé je ne sais pas, admiratif certainement oui. Le travail de Vincent Munier, qui n’est plus à présenter me parle énormément. Il y a un photographe que j’admire véritablement, il s’agit de Jim Brandenburg. Son travail de recherche sur les lumières et les atmosphères me fascine, c’est absolument extraordinaire. Son travail est une très belle respiration.

Tous droits réservés à Guillaume François
Parmi tes photos, si tu ne devais en retenir qu’une seule, peux-tu nous présenter ta photo préférée et nous raconter son histoire?
L’image ou plutôt la rencontre qui m’a le plus marqué, c’est celle avec le Lynx Boréal, c’était en 2013. Depuis tout jeune, je voyais les traces de cet animal à quelques dizaines de mètres de la maison familiale. Il a marqué mon enfance. Il s’agissait pour moi d’un rêve de rencontre, mais il était presque un mythe. A l’âge de 15 ans j’ai commencé à suivre une femelle lynx, dont j’avais trouvé quelques empreintes par hasard. J’ai alors arpenté son territoire afin d’en apprendre un peu plus sur sa vie et espérer l’observer un jour. Mais la tâche fût longue et fastidieuse. Je me suis rendu compte, au fil des mois, de la grande difficulté d’observer cette espèce.
Il s’agit sans aucun doute d’une des espèces les plus difficiles à voir en Europe. Petit à petit, au fil du temps, j’ai fait partie du territoire de cette femelle. Dans le plus grand respect et la plus grande discrétion, je montrais « patte blanche ». Au fil des mois, je sentais qu’elle me laissait beaucoup plus d’indices de sa présence, et quelques brèves observations se sont alors produites au fil des saisons. Puis, après pratiquement cinq années passées sur le terrain, début septembre de l’année 2013, j’ai vécu mon plus beau moment, la plus belle émotion vécue dans la nature à ce jour : la femelle lynx s’est dévoilée… avec ses deux petits, au coeur d’une enclave forestière où j’avais l’habitude de me rendre. J’ai alors pu les observer pendant plusieurs heures. Ils jouaient en lisière comme pourraient le faire des chats ou des renardeaux, c’était un moment extrêmement fort.
Ce soir-là, je n’ai pu faire qu’une seule image, je tremblais tellement d’émotions, pourtant l’appareil était installé sur mon trépied ; la végétation était haute également en cette fin d’été ce qui n’arrangeait pas les possibilités de faire des images, mais honnêtement, cela m’était presque impossible de mettre l’appareil devant les yeux, je souhaitais contempler et vivre cet instant pleinement. Je me souviens qu’à la nuit tombée, ils étaient toujours là, ils jouaient et grognaient l’un sur l’autre. A ce moment-là, ma place n’était plus avec eux, j’ai dû repartir, le coeur chargé de souvenirs. Les jours et les semaines qui ont suivies, je suis retourné sur le territoire de cette famille de lynx, et j’ai alors pu faire de nouvelles observations et de nouvelles images.

Tous droits réservés à Guillaume François
Quelle serait la prochaine photo que tu aimerais faire ?
J’ai beaucoup d’images en tête, et de souhaits de rencontre, ce serait compliqué de citer qu’une seule image.

Tous droits réservés à Guillaume François
Peux-tu nous parler de tes projets photographiques?
Beaucoup de projets se profilent à l’horizon, il faudra du temps pour les réaliser, mais je travaille notamment depuis plusieurs années sur un projet de livre sur la forêt, ainsi qu’un film à ce sujet. Il sera publié sous ma maison d’édition que je viens de créer, « Les éditions Sentinelle » D’autres projets sont en cours de réalisation, avec notamment de belles collaborations mais c’est un peu tôt pour en parler…

Tous droits réservés à Guillaume François
Imagine que l’on te donne un crédit illimité, quel projet photographique, dingue ou plus sage, aimerais-tu réaliser?
Je n’ai pas en tête quelque chose de précis à ce sujet. Je crois juste que je souhaiterais pouvoir continuer à faire de ma vie de l’image et des rencontres sauvages, peu importe l’endroit dans le monde, il y a tellement de choses à voir, tellement de choses à apprendre sur la nature, son rôle, notre rôle et sur nos liens avec les origines du vivant, mais je crois qu’une vie ne suffirait pas…

Tous droits réservés à Guillaume François
Peux-tu nous raconter un de tes meilleurs souvenir pendant une séance photo et pourquoi pas également le pire?
L’un de mes meilleurs souvenirs de terrain, il y en a plein, mais disons le plus récent, c’était il y a quelques semaines seulement, je suis revenu des côtes écossaises. J’avais fait un repérage des lieux en 2015, et fin mai 2018 je me suis rendu sur place de nouveau, le long des côtes sauvages, à l’Est de l’Ecosse, pour voir l’avifaune des falaises. Avec mon meilleur ami, nous avons pu observer et photographier des centaines de milliers d’oiseaux, notamment les Pingouins Torda, Guillemots et Macareux Moine. Nous avons passé d’excellents moments au contact de cette nature qui n’a pas de crainte de l’homme, où le bipède ne représente pas un danger, et cela est extrêmement fort comme sentiment et très plaisant. Nous ne sommes pas habitués à cela dans nos contrées, et globalement en France, où la pression humaine est constante sur la nature sauvage.

Tous droits réservés à Guillaume François
Si tu devais faire découvrir un photographe peut être encore méconnu, et un seul, qui proposerais-tu?
Quelques amis photographes me viennent en tête, mais j’ai envie de parler d’un tout jeune photographe et ami, Lucas DESCAMPS. C’est un jeune absolument incroyable, que j’avais rencontré il y a quelques années déjà dans les allées des festivals de photographies nature, comme Montier-en-Der ou encore Tignécourt dans les Vosges. Il débute en photographie puisqu’il a seulement 11 ans. Mais il a déjà une fascination pour la nature et l’image absolument extraordinaire. Il a beaucoup de connaissances sur la nature et beaucoup de respect pour celle-ci. Lucas a déjà un grand sens de la composition et des cadrages. Il a déjà exposé deux fois son travail photographique. Sans nul doute qu’il sera et qu’il est déjà le fer de lance de la nouvelle génération de photographes nature.

Tous droits réservés à Guillaume François
Un dernier mot?
Je te remercie beaucoup Grégory pour cette interview. Je profite de cet instant pour rendre hommage à tous les combats menés de par le monde par ceux qui sont encore soucieux de protéger cette nature qui nous entoure, et dont nous dépendons tous intimement.
Merci pour la découverte, de très belles photos et une superbe philosophie de vie ! 🙂
Merci Anne,
Si tu as des suggestions de photographe à découvrir je suis preneur!
Merci de m’avoir fait découvrir ce photographe animalier talentueux. L’interview, intéressante, est bien illustrée par de jolies photos.
Merci Stephane,
Je vous proposerais régulièrement de découvrir des photographes de talents, mais je suis également preneur de proposition 😉